Ainsi vont nos cœurs.
J'ai repensé au point de départ, à ce studio minuscule en banlieue parisienne, son rez-de-chaussée bruyant, mal isolé, aux trajets quotidiens en métro, à cette vie étriquée dont je n’aurais jamais osé rêver sortir. Et je vois aujourd’hui cette maison, ce jardin, cette vie douce et lente, ce foyer auquel je peux consacrer tout mon cœur, toute mon âme.
Évidemment, tout n’est pas parfait. Rien ne le sera jamais vraiment, parce que la perfection n’appartient pas à ce monde et pourtant, j'ai bien souvent comme un avant-goût d’éternité.
J'ai encore des rêves, bien sûr, des projets, des désirs qui me portent, mais je sais apprécier pleinement l'ici et maintenant, et mon cœur sait désormais où se fixer ; sur Celui sans qui rien de tout cela n’existerait,
L’essentiel, la priorité absolue.
Mon âme,
et son Créateur.
Ainsi vont nos cœurs.
Quand j’étais petite, je rêvais d’avoir 20 ans.
Quand j’ai eu 20 ans, je rêvais de trouver l’amour.
Quand j’ai trouvé l’amour, je rêvais de quitter Paris.
Quand j’ai quitté Paris, je rêvais de fonder une famille.
Quand j’ai fondé ma famille, je rêvais d’une maison à la campagne.
Quand j’ai eu ma maison, je rêvais d’un chien.
Quand j’ai eu mon chien, je rêvais de poules.
Maintenant que j'ai des poules, je rêve d'un verger, d'un jardin plus grand, de plus de campagne, plus de silence, de plus, toujours plus...
Ainsi vont nos cœurs ; sans cesse ils renouvellent leurs désirs, toujours en mouvement, toujours tendus vers un peu plus de vie, un peu plus de beauté, un peu plus de plénitude. C'est une bonne chose lorsque ces désirs sont beaux et bons, lorsqu'ils nous réjouissent, nous rapprochent de l'essentiel et nous donnent assez d'élan pour avancer. Et, paradoxalement, en ce qui me concerne, ils me mènent vers une vie plus simple, plus de savoirs-faires, plus de lenteur... Mais malgré tout, cette quête incessante me rappelle combien nous sommes inachevés, combien même lorsque le bonheur est là, il n'est pourtant jamais complet. C'est bien normal ; nos coeurs sont fait pour l'infini.
Et pourtant, regardez combien nous nous donnons de mal pour atteindre ces buts !
On travaille dur pour habiter l’endroit dont on rêve,
On s’impose des efforts pour avoir le corps que l’on souhaite et la santé à laquelle on aspire,
On investit du temps, de l’argent, de l’énergie pour acquérir des compétences, pour bâtir nos projets, pour réaliser nos ambitions,
On se lève tôt, on se prive, on recommence mille fois pour progresser.
Si seulement nous nous donnions autant de mal pour grandir dans la vertu, pour aimer Dieu, accomplir sa volonté et purifier nos cœurs.
Si seulement nous avions la même ardeur pour faire connaître son Nom que pour faire avancer nos projets.
Imaginez alors ce que serait le monde,
si nos cœurs déployaient pour Lui la même énergie, la même passion, la même obstination qu’ils dépensent pour mille autres buts passagers.
Car tout ce que nous cherchons, tout ce que nous possédons, tout ce que nous croyons atteindre finira par s'évanouir ; nous gravissons des montagnes pour découvrir devant nous d'autres sommets, nous remplissons nos mains de biens et de réussites mais nos mains, sitôt ouvertes, à nouveau sont à moitié vides.
Mais en Dieu, rien ne se dérobe, rien ne s’épuise, rien ne déçoit et, quand l’âme Le trouve, elle sent que la soif qui l’agitait depuis toujours n’était qu’une intuition de ce Bien infini ; son désir, enfin, se fixe sur la source de toutes ses joies.
En Lui le cœur ne se heurte plus à aucun mur, aucune limite, il ne connaît plus l’inachevé ; tout n'est que plénitude, lumière, grandeur et perfection, et l’âme, étonnamment, se découvre rassasiée sans jamais être saturée.
Les biens de la terre sont enfin remis à leur juste place et notre cœur apprend à désirer autrement, il ne ressemble plus à un affamé qui cherche à combler un vide mais à un enfant plein de gratitude pour ce qu'il vit et reçoit. Alors nos maisons, nos familles, ce qu'on bâtit, tout cela nous renvoie sans cesse à plus grand et on ne s’y arrête plus comme à un but, mais comme aux prémisses de l'Éternité.
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