Nous sommes les bergers de nos enfants
S'il y a bien une chose que ma rupture amicale m'a offerte, c'est l'occasion précieuse de montrer à mes enfants quelque chose de vraiment beau. Le chemin de la paix, de la charité ; l'amour des autres, quoi qu'il arrive. J'ai expliqué à mes enfants que mon amie et moi n'étions, précisément, plus amies, et que par conséquent nous ne les reverrions plus. Évidemment, ils m'ont demandé pourquoi et, lorsque je leur ai répondu, de manière très simple et, bien sûr, sans entrer dans détails, mon fils de 5 ans a tout de suite froncé les sourcils parce que, voyez-vous, il était très, très fâché. Il est comme ça. C'est tout à fait lui. Son tempérament est enflammé, colérique, et il a une très mauvaise tolérance à ce qu'il perçoit comme des situations injustes. Il était donc prêt à aller chez elle pour se fâcher franchement mais, à la place, je lui ai dit qu'on allait se mettre à genoux ensemble et prier pour sa famille et elle de tout notre coeur, parce qu'il n'y aucune raison d'être fâché. On ne peut forcer personne à nous aimer ; la colère, ici, ne nous servira à rien. Alors il s'est mis à genoux, sa soeur et moi aussi. Et on a prié. Sans colère, ni rancune ; sincèrement, simplement, et de bon coeur. Je lui ai demandé si ça allait mieux, et il m'a répondu "Je me sens beaucoup moins fâché mais encore un peu quand même." Inutile de dire que ça m'a fait sourire ; mais je sais, je sens, qu'il a compris. Parce qu'il m'a vue, apaisée, souriante, et parce qu'il a entendu les paroles que j'ai prononcées. Il ne m'a pas entendu médire, critiquer, ruminer ; pas de moquerie, pas de désir de vengeance ou de lutte. Rien, rien que du bon, de l'amour, la capacité à pardonner et une pleine confiance dans ce que le Bon Dieu permet que nous ayons à essuyer.
C'est ce qui m'a inspiré cette publication.
Nos enfants nous regardent.
Tout le temps.
Surtout quand on ne le remarque pas.
Ils nous regardent lorsqu’on les croit absorbés dans leurs jeux,
Ils nous écoutent quand on pense discuter “entre adultes”,
Ils nous observent quand on est sous pression,
à bout de forces, bousculés par les remous de la vie.
Et ils absorbent, et ils apprennent ;
Sur le monde, sur eux-mêmes, sur nous.
Sur Dieu, aussi.
Ils voient comment on réagit au conflit,
comment on parle des autres,
comment on gère la contrariété, la fatigue, l’échec.
Ils voient comment on traite celui qui nous dérange, comment on accueille l’imprévu,
comment on parle de notre mari (ou de notre femme), comment on s'adresse les uns aux autres et comment on essaie de s'entendre au milieu de nos désaccords.
Ils repèrent ce qui nous fait sortir de nos gonds,
ce qui nous fait sourire et soupirer et ce qu'on offre dans nos prières.
Ils perçoivent nos incohérences, l'épuisement qu'on ne sait pas gérer, les excuses qu'on se trouve et les vérités avec lesquelles on essaie de négocier.
Ils savent si notre foi est véritable, honnête, si elle oriente réellement notre vie ou si elle n'est rien qu'une belle idée enracinée dans le néant et qui nous pousse à leur enseigner ce qu'on ne s'applique pas à nous-même.
Ils voient si nous vivons de ce que l'on croit,
Si nos principes tiennent bon ou s’ils s’écroulent dès que ça nous en demande un peu trop.
Ils savent, ils sentent si leur maison est ancrée en Dieu ou simplement centrée sur ce qui est pratique, confortable et acceptable pour tout le monde.
Et tout ce qu’ils voient, ils le retiennent.
Ce qu’ils perçoivent chaque jour devient leur manière d’être au monde.
Ils n’imitent pas seulement nos discours mais ce que nous sommes, ils ne font pas ce qu'on leur demande mais ce que l'on fait ; nul besoin d'être parfaits, ce n'est pas ce dont ils ont besoin,
Ce dont ils ont besoin, c'est d'exemple, de vérité, ils ont besoin de bergers capables d'emprunter le chemin qui les mènera à bon port,
De parents qui croient pas pour faire bonne figure ou par tradition mais parce qu’ils ont mis leur espérance en Dieu, capables de demander pardon, de prier dans la difficulté et pour ceux qui leur nuisent, de rester fidèles au Seigneur en toutes circonstances.
Nos enfants ont besoin de voir que la foi n’est pas une option, ni un choix arbitraire, ni un refuge, une jolie histoire qu'on se raconte, mais une manière de vivre, un chemin de joie, de lutte aussi, mais lumineux, et beau, et vrai,
Quelque chose qui nous engage, corps et âme.
C'est un témoignage qu'aucun catéchisme ne saura remplacer.
On peut leur parler de Dieu tant qu'on le veut, leur faire réciter de belles prières ; s’ils ne Le voient pas habiter nos journées, nos paroles s’écraseront dans le vide.
Alors, la vraie question n’est pas "Que vais-je leur transmettre ?" mais "Qu'est-ce que je leur montre, jour après jour ?"
Parce qu’un jour, ils ne vivront plus sous notre toit.
Ils devront affronter le monde, le doute, la solitude, peut-être l’épreuve.
Et ce jour-là, ce qui pèsera dans la balance,
ce ne sera pas la beauté ou la grandeur de nos discours, mais le souvenir encore vivant d’une foi qu'ils auront vue à l'oeuvre dans les âmes de ceux qui les auront élevés,
dans les petits combats,
les grandes tempêtes,
dans les joies simples
et les bonheurs indicibles.
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